L’égalité homme-femme est un fait d’actualité qui préoccupe nos sociétés occidentales, et au-delà, partout dans le monde, des femmes luttent encore pour leur émancipation et leurs libertés. La place de la femme dans la société corse a évolué au fil du temps, de la préhistoire à nos jours.
À travers la thématique « Donne di Corsica », les musées de la Collectivité de Corse ont mis en synergie quatre expositions temporaires allant : du néolithique, à travers la statuette de Campu Fiureddu au Musée de l’Alta Rocca à Livìa : « Femina Celesta. Symboles du féminin sacré » en passant par la période étrusque au Musée d’Aleria : «LUCE ETRUSCA – Parures féminines étrusques» jusqu’à la période moderne au Musée Pasquale Paoli à Merusaglia : «Maria Cosway 1760-1838 A strada eccezziunale di un’artista» et enfin, un panorama général au Musée de la Corse à Corti : «Méditerranéennes, ritratti di Donne». Avec le Centre Méditerranéen de la Photographie «Fémin’Isula.»
Maria Cosway 1760-1838 A strada eccezziunale di un’artista
Si Maria Cosway est connue en Corse, c’est surtout grâce à la correspondance qu’elle a échangée avec Pasquale Paoli.
Parmi les nombreuses œuvres exposées, leurs échanges intimes nous permettent de découvrir la vie mondaine du Général au sein de la High Society britannique lors de ses exils en Angleterre.
Maria est née à Florence le 11 juin 1760, où ses parents tenaient un hôtel fréquenté par la meilleure société anglaise dans la Toscane des Habsbourg-Loraine. Dès son enfance à Florence, son destin semble tout tracé : elle sera peintre. Les artistes anglais qui croisent sa route lui prédisent un grand destin de peintre d’histoire. En 1778, Maria est élue le plus jeune membre de la prestigieuse Accademia delle Arti del Disegno de Florence.
À Londres, où sa carrière débute avec l’exposition de ses œuvres à la Royal Academy of Arts, le succès est immédiat. Mariée en 1781 à Richard Cosway, peintre officiel du prince de Galles, elle fera la connaissance de Pasquale Paoli en 1782 lors de son 1er exil à Londres. S’amorce alors une correspondance régulière qu’ils entretiendront plus de vingt ans.
Véritable pilier paternel de Maria, il devient même le parrain de sa fille Louisa Paolina Angelica née en 1790. Après la perte de sa fille en 1796, Cosway se concentre sur des sujets religieux et des allégories de la mort.
À Paris, elle rencontre le Cardinal Fesch qui l’encourage dans l’idée d’ouvrir une école pour jeunes filles à Lyon.
Elle s’intéresse aux méthodes pédagogiques novatrices et ludiques. C’est finalement avec le soutien du Duc de Lodi en Italie, qu’elle fonde en 1812, le collège de la Bienheureuse-Vierge-des- Grâces.
En 1834, Ferdinand 1er lui confère le titre de baronne de l’Empire Autrichien, en reconnaissance de ses activités pédagogiques. D’une grande valeur symbolique, ce titre lui assure l’indépendance et la respectabilité sans caution maritale.
Récompensée pour son investissement qu’elle ne devait qu’à elle- même, Maria Cosway atteint ainsi sa pleine émancipation.
Source : Dossier de presse du Museu Pasquale Paoli de Merusaglia. Remerciements à Isabelle Latour pour son aide précieuse.
Luce Etrusca
Quand on visite le musée d’Aleria devant les merveilleuses parures exposées, on se prend à réver, notre imaginaire nous transpose dans ces siècles avant notre ère.
Et on imagine ces femmes belles, élégantes, richement vêtues, parées des plus prestigieux bijoux de leur temps.
Et tout de suite une question, quel sens, quelle signification donner à ces parures, comment les interpréter ?
Quelle était la place de ces femmes dans la société du temps ?
Les nécropoles de Casabianda et de Lamaghjone nous prouvent que la pratique du banquet aristocratique étrusque a été pratiquée sur le territoire actuel d’Aléria, les tombes dites à « symposion » nous ont livré le matériel qui lui était nécessaire. Ce rituel emprunté aux Grecs dès le VIIIe siècle, consistait en une cérémonie où l’on mangeait des aliments solides, des céréales et de la viande dans un premier temps, appelé le deipnon. Puis, dans un second temps, après avoir soigneusement débarrassé, commençait le symposion qui consistait à boire ensemble, une boisson à base de vin. Il s’agissait de faciliter le passage du défunt dans l’au-delà, les objets sacrés étaient pour finir déposés dans sa tombe.
Les fresques retrouvées à Tarquinia, une des cités étrusques situées en Toscane, nous montrent des hommes et des femmes lors de ces cérémonies, les épouses participaient à ce rituel avec leurs maris. Ce détail qui peut paraitre anodin choquait beaucoup les Grecs qui eux l’interdisaient aux femmes, et en particulier à leurs épouses.
Etonnamment modernes ces Etrusques ! Ils semblaient être dans une égalité pratiquement parfaite dès les Ve, IVe siècle avant notre ère.
Un sujet qui aujourd’hui encore est toujours d’actualité.
Nous savons grâce aux inscriptions sur les couvercles des sarcophages sculptés que les femmes pouvaient revendiquer une descendance matrilinéaire, être nobles parce qu’elles descendaient d’une femme noble. Nous savons qu’il s’agissait malgré tout d’une société patriarcale, on peut leur pardonner, ils ont vécu il y a plus de 2500 ans, et bien de nos sociétés contemporaines sont très loin de ce niveau d’égalité et de respect mutuel.
A u Museu di L’Alta Rocca in Livìa
L’exposition «Femina Celesta. Symboles du féminin sacré» est une raison de plus pour visiter le Musée qui nous conte dix mille ans d’histoire de la Corse.
De la Dame de Bunifaziu, longtemps considérée comme la doyenne des Corses, à la statuette retrouvée sur la commune de Grossa (au lieu-dit Campu Fiuredda). C’est l’occasion ou jamais de venir l’admirer, avant qu’elle ne retourne dans les réserves du British Muséum.
La contempler en tant qu’objet d’art, car c’est de toute évidence la plus belle des statuettes retrouvées en Corse. Mais surtout s’interroger sur son interprétation, comment imaginer la société qui l’a produite, le rôle de la femme dans ce néolitihque insulaire ?
Les spécialistes émettent des hypothèses divergentes.
Dans son ouvrage, «l’Âme des pierres» le Docteur François de Lanfranchi, nous livre une étude complexe et détaillée des statuettes de Corse, en analysant les similitudes qui existent (ou non), avec celles de Malte et de Sardaigne.
L’archéologue Américano-Lituanienne Marija Gimbutas, y voit le culte de la Déesse Mère, en contradiction avec le préhistorien Jean Guilaine qui pense qu’il s’agit «d’un rite de passage», «des représentations sociales», ou même «des jouets»…
Sans compter sur les travaux scientifiques de l’archéologue Pascal Tramoni, qui nous éclaire sur les statuettes de Corse éparpillées dans différents musées d’europe.
En attendant, l’admiration que nous portons à cette statuette féminime, laissons libre cours à notre imagination.
Remerciements pour l’aide précieuse apportée à Kewin Pêche- Quilichini et Pascal Tramoni
A u Museu di a Corsica in Corti
L’exposition temporaire «Méditerranéennes, ritratti di Donne», présentera une série de portraits de femmes à partir des collections du Centre Méditerranéen de la Photographie. Au-delà de la qualité, de la beauté des sujets et des paysages, nous pourons voir dans ces images, ces visages, ces regards, le long et difficile chemin emprunté par nos mères, nos sœurs, nos épouses et nos filles pour arriver aujourd’hui à faire entendre leurs voix, reconnaître leurs droits et avancer sur le chemin de l’émancipation.
Extrait de l’introduction du dossier de presse Femin’Isula, P.J. Campocasso
À traversu quattru espusizione, «Donne di Corsica» ci cconta l’evuluzione di a piazza di e donne in Corsica da a prestoria à oghje. I musei di a Cullettività presentanu artefatti è opere chì illustranu i varii roli di e donne corse franchendu i tempi, da a statula neulitica di campu fiuredda à l’artista di u XVIIIesimu seculu Maria Cosway. Stu percorsu mette in luce e lotte d’emancipazione è di ricunniscenza di i diritti di e donne, testimonii di a so cuntribuzione essenziale à a sucetà.
Testu : Marcel Montisci