3 mars 2023

A nuciola di Cervioni

Il fût un temps, Cervioni était le « pays des cerfs »…
Mais aujourd’hui, on connait surtout cette petite commune de la Plaine Orientale pour ses noisettes de grande qualité ! En poudre, en huile, en confiserie, en pâte à tartinée… Bref, a Nuciola di Cervioni est un produit incontestable de la gastronomie insulaire. D’où vient cette renommée ?

A terra corsa, ideale per e nuciole

Appartenant à une vieille variété du sud de la France, « Fertile de Coutard », la noisette de Cervioni étonne par son goût exquis, boisé et légèrement sucré. Riche en nutriments, les atouts de l’insularité en sont bien les raisons !

En effet, la noiseraie, de Lucciana à Ghisonaccia, présente des qualités naturelles qui rendent son acclimatation idéale : un sol argilo-schisteux et très limoneux, une orientation nord-est qui assure un ensoleillement et une humidité spécifiques, ou encore des précipitations annuelles importantes et des eaux pluviales retenues en fonds de vallées… En plus, les noisetiers sont utiles puisqu’ils consolident les pentes qui s’écroulent à cause de l’érosion.

Ce n’est pas tout ! Le balanin, espèce parasite de la noisette, est absent de l’île, tout comme les écureuils. En outre, l’absence de prédateurs exempte les vergers de pesticides.

Les caractéristiques très favorables du territoire permettent de produire des noisettes tout à fait uniques : belles, parfumées, rondes et volumineuses.

Da l’apparizione à l’apugeu di a cultura

La noisette en Corse ne date pas d’hier : des traces de cette culture existe en Méditerranée depuis la Haute Antiquité (3300 à 525 avant J-C.), comme en témoignent les écrits de Caton l’Ancien sur l’agriculture.

C’est tout au début du XXème siècle que la culture de la noisette connait un véritable essor en Corse. Trois années de gel successives de 1905 à 1907 viennent à bout des cédratiers qui étaient déjà victimes de la concurrence étrangère et de « La Misère en Corse », comme le titre un éditorial du Petit Bastiais, en faisant référence à une crise économique. Les noisetiers remplacent alors ces vergers.

L’arrivée de la guerre et le développement fulgurant de l’industrie agroalimentaire accélèrent la culture de la noisette. Dès lors, elle devient un complément de revenus : les institutions mettent en place des primes à la plantation, de 15 francs par arbre, pour aider les producteurs locaux. Jusque dans les années 1960, la Corse est en tête du classement des régions productrices de noisettes ! En 1967, le « Syndicat des producteurs de noisette de la région de Cervioni » est même créé dans le but d’encourager la plantation et la production.

La demande étant croissante, cette production ralentit cependant avec l’arrivée de nouveaux concurrents, notamment celle des Turques qui proposent des prix plus attractifs. Malgré ce déclin, Cervioni conserve cette activité patrimoniale : l’association « A Nuciola » est donc fondée en 1999, afin de garantir la qualité et la juste rémunération de la production.

Nuciole arradicate à u paesagiu corsu

Véritable succès commercial, la noisette de Cervioni est si réputée qu’elle s’inscrit dans un vocabulaire significatif : par exemple, dans un descriptif de variétés, l’INVUFLEC (Institut National de Vulgarisation pour les Fruits, Légumes et Champignons) parle de « Fertile de Coutard ou de Noisette de Cervioni ». En Corse, le terme « nuciola » est préféré à « nucellula » dans certaines régions.

Devenue un produit emblématique, la noisette de Cervioni bénéficie depuis 2014 d’une Indication Géographique Protégée et fait l’objet d’une foire très fréquentée depuis 23 ans maintenant : A Festa di a Nuciola, qui a lieu chaque année au mois d’août pour déguster le fruit à coque ou transformé.

Bibliographie :
Cahier des charges de l’Indication Géographique Protégée « Noisette de Cervioni – Nuciola di Cervioni »
Crise de structure économique et crise de conscience en Corse (fin XIXe – début XXe), Francis Pomponi

Cunsumata in polvara, in oliu, o ancu in pasta da tartinà, a nuciola di Cervioni s’hè stallata per durà ind’u paesagiu isulanu in qualità di robba rinumata è di prima trinca. Sta cultura s’hè sopratuttu svilluppata in principiu di u XXesimu seculu fendu di a regione a prima prudutrice di u paese sin’à l’anni 60. Oghje ghjornu, stu pruduttu squisitu ; natu da una terra feconda è preziosa ; hè festighjatu ogni annu ind’u so paese.