6 juin 2022

La truite de Corse

Qu’entendons-nous par « truite de Corse » ?
La truite corse (Salmo trutta de type macrostigma) est une sous-espèce de la truite commune ou fario. Nommée « Duméril » puis « Spillmann » jusqu’au milieu du XXe siècle, cette truite de rivière a d’abord été associée à la truite de Kabylie en Algérie. Le nom répandu macrostigma, qui signifie « grosses tâches » et faisant allusion à sa ponctuation, a été réutilisé à tort et sans étude comparative pour d’autres truites et notamment l’espèce corse.

En Corse, deux espèces de truite existent : la truite arc-en-ciel provenant d’Amérique du Nord et la truite de rivière ou fario (Salmo trutta), aussi présente dans toute l’Europe. Cette dernière est représentée par trois truites de souches : corse, méditerranéenne et atlantique. Parmi l’ensemble de ces espèces, il faut encore dissocier les truites sauvages qui sont arrivées naturellement dans l’île, la corse et la méditerranéenne, de celles qui ont été introduites par l’homme, c’est-à-dire l’atlantique qui est élevée en pisciculture et l’arc-en-ciel.

Ainsi, lorsqu’on évoque « la truite de Corse », l’expression désigne en réalité les deux formes de truites sauvages. Nous parlons ici essentiellement de la truite macrostigma, c’est-à-dire la truite ancestrale de souche corse et la souche méditerranéenne, indigène à la Corse.

Una spezia olobiotica è pulimorfa chì s’hè adatta à l’isula

La truite macrostigma est une espèce qui accomplit son cycle biologique entièrement en eau douce (température comprise entre 0 °C et 20 °C). Elle a su s’adapter aux contraintes de son biotope, notamment aux grandes variations de débit et aux températures élevées de l’eau durant la saison estivale. Malgré sa croissance difficile, on estime que les populations sont plus importantes que les autres truites.

De plus, la truite de Corse vit en altitude, à l’extrême amont de quelques cours d’eau et têtes de bassin-versant, isolée des autres truites qui occupent le reste du réseau hydrographique. Cet isolement s’explique en raison de la présence de cascades infranchissables et des cours d’eau accidentés par exemple, ce qui a entraîné une certaine conservation des populations ancestrales pendant plusieurs millions d’années puisqu’elles ne se sont pas reproduites avec les autres espèces. À ce propos, compte tenu de la vitesse d’évolution du milieu, le premier peuplement insulaire en truites (souche corse et/ou méditerranéenne) serait relativement récent, engendré par la fonte des neiges et des glaciers qui recouvraient de manière permanente et dégressive la haute montagne corse jusqu’aux vallées pendant l’ère quaternaire. On suppose que leur arrivée daterait d’il y a 5 millions d’années mais nos connaissances sur la paléogéographie de l’île sont imprécises sur cette période.

De cet isolement découlent des distinctions plus ou moins marquées entre les truites. La robe de la macrostigma varie fortement en fonction des milieux où elle se trouve, ce qui la rend difficilement reconnaissable.

Si l’on devait définir un profil type, on imaginerait de grosses taches rouges qui fusionnent parfois en plaques sur ses flancs, des point noirs, dont l’un se situe derrière l’opercule, une nageoire caudale et la mâchoire inférieure avancée. D’autres phénotypes existent et l’aspect du corps, sa coloration et ses ponctuations changent aussi avec l’âge et le milieu de vie des individus. Par ailleurs, les souches de pisciculture reprennent des couleurs proches de celles des truites sauvages lorsqu’elles sont réintroduites. C’est pourquoi seule l’analyse génétique permet d’identifier la truite macrostigma avec certitude.

A picciulata rossa hè vulnerabile…

Depuis quelques décennies, la population des truites insulaires a été grandement altérée par le braconnage et l’hybridation avec les espèces issues de piscicultures. Malgré les efforts de pêcheurs passionnés pour sauvegarder la truite endémique, son effectif demeure assez faible. Encore aujourd’hui, elles restent sujettes à une contamination génétique, notamment parce que cette souche ne se reproduit pas en captivité. S’ajoutent également la pollution des eaux et l’impact du changement climatique : les grandes crues, l’assèchement historique des rivières cette année…
Des actions de préservation des truites sauvages prévues par le Plan de gestion de la truite se poursuivent. L’une d’elles est de sensibiliser à cette cause.

A pescia corsa, detta « picciulata rossa », hè una sottu spezia di a truita cumuna chì campa ind’i fiumicelli alti di l’isula. Apparsa qualchì millione d’anni fà, sta spezia pulimorfa s’hè adatta à e difficultà di a regione, per ciò, a so apparenza assai variata ùn parmette micca di distinguela senza analisi genetichi. Oghje ghjornu, malgradu i sforzi di salvaguardia fatti da i piscatori passiunati è di certi associi, a pescia corsa ferma minacciata d’ibridazione incù l’altre pescie intrudutte in Corsica da l’omu, a pesca for’di legge è u riscaldamentu climaticu.