4 avril 2025

U zinzì : sapore puru di u mediterraniu

C’est l’un de ces petits trésors que la méditerranée garde jalousement. Caché sous sa carapace hérissée de piquants, l’oursin dévoile une chair orange ou rouge vif, aussi délicate qu’intense en goût. C’est une gourmandise qu’on attend chaque année avec impatience, une saveur brute et iodée qui ravit les amateurs de produits de la mer. Fragile et précieux, l’oursin, est aussi un marqueur de saison, un plaisir éphémère qui se déguste à l’abri du vent, un verre de blanc à la main, les yeux rivés sur l’horizon.

Una tradizzione bell’aradicata

En Corse, l’oursin est plus qu’un simple « produit de la mer », c’est un véritable rituel. Dès les premiers frissons de l’hiver, lorsque l’eau se rafraîchit et que la saison de la pêche ouvre ses portes, les connaisseurs se préparent à partir en quête de ces petits bijoux épineux. «Aller aux oursins» est une sortie qui mêle patience et convivialité. On les récolte à la main, souvent en apnée, en veillant à ne prélever que ceux qui ont atteint une taille suffisante. Les habitués, ceux qui ont l’œil et l’expérience, savent exactement où chercher : bien accrochés aux rochers, dans les fonds clairs et peu profonds du littoral. Mais attention, la pêche aux oursins n’est pas libre comme l’air. Elle est strictement encadrée, car l’espèce souffre : entre la gourmandise des amateurs, la pression des restaurants et les effets du réchauffement climatique, les oursins corses sont aujourd’hui fragilisés.

Un banchettu salvaticu è iudatu

L’oursin se déguste dans une simplicité absolue. Son goût ? Un concentré de mer, une explosion de saveurs marines avec une pointe de douceur beurrée qui laisse en bouche un souvenir impérissable. Pour le savourer dans les règles de l’art, pas besoin de fioritures : un couteau, un bon coup sec sur la carapace, et il ne reste plus qu’à prélever les cinq languettes orangées, aussi appelées corail. En Corse, il est coutume de les déguster « à même le rocher », accompagnés d’un morceau de pain croustillant et d’un filet de citron. Certains les mélangent à des pâtes fraîches, façon « spaghetti alle ricci di mare », un plat typique de la gastronomie italienne, tandis que d’autres en font une brouillade délicate. Mais c’est bien « nature » que l’oursin révèle toute sa splendeur, lorsqu’il est encore gorgé des parfums de la mer.

Una spezia sottu pressione

Si l’oursin est une merveille gustative, il est aussi une espèce en danger. En raison de la forte demande, ses populations se raréfient sur certaines côtes. La Corse n’échappe pas au phénomène. Ces dernières années, les autorités ont renforcé la réglementation pour en limiter la pêche et protéger cette divine ressource. Les professionnels comme les amateurs doivent respecter des quotas : pas plus de 3 douzaines par personne et par jour, et interdiction formelle de les vendre sans autorisation. Les périodes de fermeture permettent également aux oursins de se reproduire et d’assurer leur pérennité. Ainsi, la pêche aux oursins est autorisée, pour les pêcheurs professionnels et les pêcheurs plaisanciers, du 15 février au 15 avril inclus.

Priservazione è tramandera culturale

Si vous n’avez pas l’âme d’un pêcheur, rassurez-vous, l’oursin se déguste aussi dans certains établissements qui privilégient une pêche locale et raisonnée. De Bastia à Ajaccio, en passant par Bonifacio ou l’Île-Rousse, plusieurs restaurants en proposent durant la saison. Certains organisent même des oursinades, ces festins en plein air où l’on partage des plateaux d’oursins autour d’un bon verre de vin. Parmi les meilleurs accords, on recommande un Vermentinu bien frais, dont les notes minérales et florales subliment l’iode du corail. Pour les amateurs de sensations plus intenses, un vin blanc vieilli en amphore ou un muscat sec corse peuvent aussi faire des merveilles !

Un piaceru effimeru ma priziosu

L’ oursin est un mets rare, fragile, qui se mérite. Chaque dégustation est une promesse de saveurs intenses et d’instants suspendus, où le temps semble s’arrêter face à la beauté de la mer. Alors, que vous soyez sur une plage déserte à savourer vos propres prises ou confortablement installé à la table d’un restaurant, prenez le temps d’apprécier ce trésor marin. Car au-delà du goût, déguster un oursin, c’est aussi entrer en communion avec la mer, avec la nature, et avec une tradition insulaire qui traverse les générations.

Tisoru di u mediterraniu, u zinzì hè un deliziu scarsu è iudatu, simbulu d’una tradizione invernale bell’arradicata. Piscatu cun cura è assaghjatu tale è quale, stu cibu dilicatu seduce da u so sapore salvaticu, ma ferma minacciatu, l’abbisogna una pesca ragiunata.

Testu : Anne-Laure Casalta

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