20 septembre 2022

A torre di Mortella

Après la prise de Constantinople par les Turcs en 1453, les attaques barbaresques se multiplient le long des côtes méditerranéennes. Et avec elles, les razzias et prises d’esclaves qui en découlent. C’est dans ce contexte que la République de Gênes entame la construction de différentes tours le long des territoires qu’elle administre.

Des commissaires extraordinaires génois, sont envoyés en Corse afin de superviser la construction, mais la main d’oeuvre et le financement sont effectués par les insulaires. Deux à six hommes sont choisis parmi les habitants et rémunérés sur les taxes locales pour résider en permanence dans les tours, ce sont les « torregiani ». Ils ont pour mission de monter la garde et d’avertir les tours voisines et la population ; par un système de feux et de signaux ; en cas d’approche d’éventuels pirates. Il leur était notamment interdit de quitter leur poste pendant plus de deux jours et seulement un par un.

Ce qui nous amène à la fameuse tour de Mortella (Saint Florent), dessinée par le célèbre architecte Italien Giovan Giacomo Paleari Fratino, « Il Fratino » pour les intimes, qui est à l’origine de diverses fortifications réalisées pour le compte de Charles Quint et son fils Philippe II d’Espagne durant sa carrière. Mais il l’est aussi et surtout pour avoir conçu la première « Martello Tower » reprise par les Anglais. Quel rapport me direz-vous ? Nous y venons, patience…

Les Génois étant alors alliés de l’Espagne, Il Fratino leur est prêté et envoyé en Corse en janvier 1563, accompagné du colonel Giorgio Doria, afin d’améliorer les défenses des citadelles de Bastia, Ajaccio, Calvi et Bonifacio et pour construire de nouvelles tours littorales. À son départ en décembre de la même année, il laisse les plans de la tour de Mortella qui servira à défendre le golfe de Saint Florent. Un schéma innovant pour l’époque, d’une tour cylindrique à trois étages comprenant une plateforme à canons en son sommet et dépourvue de mâchicoulis.

Le temps passe, la Corse devient française dans les conditions que nous connaissons. Si bien que le 7 février 1794, deux navires de guerre britanniques ; alors en guerre contre les Français ; le HMS Fortitude (74 canons) et le HMS Juno (32 canons) attaquent la tour de Mortella sans succès. Il leur faudra déployer des forces terrestres pendant deux jours consécutifs pour en venir enfin à bout, sous le commandement du Major Général David Dundas et du Lieutenant General John Moore.

Impressionnés, les Anglais décident de copier les plans de la tour pour leur propre utilisation mais se trompent dans le nom, transcrivant Martello à la place de Mortella. C’est ainsi que le XIXe siècle vit construire des « Martello Towers » un peu partout dans le monde où les Britanniques étaient installés.

Peut-être maintenant, la regarderez-vous d’un autre œil.

Trà e torre genuvese edificate in Corsica ; ch’ella sia detta pagate è custruite da i Corsi ; ci n’hè una da mintuvà in particulare : a torra di Murtella. Disegnata da u celebre architettu Talianu Giovan Giacomo Paleari Fratino (dettu Il Fratino) in u 1563 ; è cupiata dui seculi più tardi da i Britannichi. Resistò à e cannunate lampate da duie nave di guerra contru à i Francesi in u 1794, cusì bè chì ci vulerà dui ghjorni d’azzuffi terrestri per ghjunghjeci à fine. Impressiunati ch’elli eranu, l’Inglesi decidonu di ripiglianne u pianu per custruì una mansa di « Martello Towers » in ogni scornu di u mondu.

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