3 mars 2023

Chjese famose di Corsica

L’étymologie nous aide souvent à mieux comprendre le sens profond des mots. Ainsi les noms « église » et « religion » viendraient respectivement du grec « ἐκκλησία » (assemblée) et du latin « religare » (relier). Ciment des civilisations, les religions et leurs églises servent à rassembler et relier les Hommes avec le divin autour de valeurs communes. Nous vous présenterons ici les plus notables de Corse, celles dont l’histoire, l’allure ou le contexte confère une singularité particulière qui nous pensons mérite d’être soulignée.

Santa Maria Assunta di Lucciana

La pro-cathédrale romane Sainte Marie de l’Assomption de Lucciana ; plus connue sous le nom de« A Canonica » ; se situe sur les ruines de l’ancienne cité romaine de Mariana où le christianisme s’installe très tôt. Le diocèse de Mariana, fondé au Vème siècle est d’ailleurs le premier de Corse. Mais la bâtisse que nous connaissons aujourd’hui fut consacrée par l’archevêque Landolfo de Pise en 1119 pour remplacer l’ancienne basilique paléochrétienne, dont les fondations encore visibles côtoient celles de la cité antique. En 1570 le diocèse de Mariana est transféré à Bastia.

Santa Maria Assunta di Bastia

Siège du diocèse de Mariana (transféré depuis Lucciana) de 1570 à 1801, cette pro-cathédrale est considérée comme la plus prestigieuse de Corse.
Bâtie au XVème siècle en lieu et place d’une ancienne église érigée sur un appui rocheux ; surnommée « l’arrembata » (l’adossée) ; Son édification est indissociable de la création de la ville, qui n’était auparavant que la marine de Cardu.
Le concordat de 1801 fait de l’île une seule province ecclésiastique, le diocèse de Corse s’établissant alors en l’église de Notre Dame de l’Assomption d’Ajaccio.

San Ghjuvà

L’église Saint Jean-Baptiste de Bastia est la plus grande église de Corse, édifiée non sans provocation en face de la citadelle génoise au XVIIème siècle. Sa façade est de style baroque et les deux clochers ont été rajoutés plus tard au XIXème siècle avec 54 ans d’intervalle. Durant la période génoise, Bastia est partagée en deux paroisses, une dans la ville basse à Terra Vechja (San Ghjuvà) ; et une dans la haute ville à Terra Nova (Santa Maria). L’intérieur est entièrement restauré en 1867. On peut y voir notamment en face à face la chapelle des marins (5ème à gauche) et celle des pêcheurs (5ème à droite) qui étaient autrefois des congrégations importantes (cf. notre article sur les confréries dans Orizonte n°3).

A Madonna di Munserrà

Il est impossible de parler des églises de Corse sans mentionner la chapelle de Munserratu de Bastia. Construite au XVIème siècle, et bien que d’apparence extérieure modeste, elle fait partie des très rares monuments AU MONDE à avoir l’immense privilège de posséder une « scala santa ». Ce droit lui fut accordé par le pape Pie VII en 1816 pour remercier les Bastiais de leur hospitalité lors du concordat de 1801, où 424 membres du clergé romain furent exilés à Bastia par Napoléon 1er.
Reproduction symbolique du prétoire de Jérusalem gravit par Jésus lors de son jugement par Ponce Pilate. Les fidèles qui montent toutes les marches à genoux en récitant une prière sur chacune d’elle et avec contrition (remords lourds et sincères) sont absous de leurs péchés.

San Michele di Muratu

Sans doute une des plus belles de Corse, cette église romane date du XIIème siècle. De style typiquement pisan, bicolore, alternant des pierres de couleur blanche (calcaire) et verte (serpentinite) formant damiers et zébrures. Véritable modèle réduit des plus prestigieux édifices de Pise et de Toscane.
Elle possède de nombreux motifs « naïfs »1 représentant humains et animaux. Il est intéressant de noter que non loin de cette église se trouve un site protohistorique (A teppa di Lucciana) qui atteste de la présence humaine du lieu depuis le 1er âge du fer.

1 L’art naïf : du latin « nativus » (natif, naturel), fait référence aux oeuvres d’artistes n’ayant pas été formés dans une école ou une académie et qui n’en connaissent et n’en respectent donc pas les codes.

L’Annunziata di Corti

Église construite en 1459 par Monseigneur Ambroise Arrighi d’Omessa, évêque d’Aleria. Les chapelles du côté ouest sont abattues en 1655 et remplacées par une nef latérale, enclavant le vieux clocher dans la nouvelle construction. Sous le généralat de Pasquale Paoli, l’édifice devint l’église paroissiale de Corte, alors capitale de l’île.
Elle possède un tableau offert par le Vatican illustrant San Teofalu di Corti (Saint Théophile de Corte) effectuant une conciliation auprès du prince Frédéric-Louis de Wurtemberg ; alors envoyé par Gênes pour une expédition punitive en Corse ; en tentant d’obtenir auprès de lui un règlement pacifique de la situation. Né Blaise de Signori à Corte en 1676, il est le seul saint Corse moderne porté sur les autels et le Patron de la Corse. L’église possède également une statue de cire du musée Grévin (1979) à son effigie.

A cappella imperiali

Cette église fut construite en pierres de Saint-Florent en forme de croix latine dans un style néo-renaissance. Dessinée et bâtie par deux architectes de la couronne, elle jouxte et forme l’aile sud du palais Fesch.
Elle fut justement érigée sur demande de Napoléon III afin de respecter les dernières volontés du cardinal Fesch ; mort en exil à Rome en 1839 ; qui y est inhumé avec plusieurs membres de la famille Bonaparte.

E chjese di Carghjese

Carghjese a la particularité de posséder deux églises de rites différents qui se font face.
Une église de rite catholique grec byzantin, l’église Saint Spyridon, et une église de rite catholique latin, l’église de l’Assomption.
En 1670, une population grecque originaire du Magne se résout à fuir la domination Turque, cherchant une terre d’accueil en Italie. Et finit par demander de l’aide à l’État génois qui leur propose de fonder une colonie en Corse, allant même jusqu’à leur octroyer une somme de 40 000 livres sans intérêt ni redevance.
C’est ainsi que débarquèrent à Paomia un peu plus de 600 Grecs en 1676, qui après moult pérégrinations que nous ne développeront pas dans cet article, finirent par s’installer à Carghjese et y construisirent leur église dans la deuxième moitié du XIXème siècle. La langue liturgique utilisée est le grec ancien et elle possède une iconostase, une grande cloison qui sépare le sanctuaire et l’autel.
L’église latine, fut elle construite un peu plus tôt, au début du XIXème siècle. Suite à une souscription lancée par des familles non grecques désireuses de posséder une église de rite latin. Elle comporte une façade antérieure scandée de pilastres plats et couronnée d’un fronton ondulant. Son clocher à étages est sommé d’un lanternon à oculus.
Les confréries de Saint Antoine et de Saint Spyridon perpétuent tout au long de l’année les traditions développées par ces deux communautés. Avec pour apogée la fête de Pâques durant la semaine Sainte.

Santa Maria Assunta d’Aiacciu

Construite à la fin du XVIème siècle dans la ville nouvelle génoise, la cathédrale Notre Dame de l’Assomption est le siège actuel du diocèse d’Ajaccio. Résultat de la fusion des cinq anciens diocèses corses : Ajaccio, Mariana-Accia, Nebbio, Aleria et Sagone, le 29 novembre 1801.
C’est ici que fut baptisé Napoléon 1er le 21 juin 1771.
Elle possède notamment un beau maître-autel offert par la princesse Elisa ; soeur de Napoléon et grande duchesse de Lucques et de Piombino ; qui le fit prélever à l’église des Trépassés de Lucques.
Elle abrita le tombeau de la famille Bonaparte jusqu’à la construction de la chapelle impériale.

A gisgia Santa Maria Maggiore di Bunifazziu

L’église Sainte Marie Majeure de Bonifacio est considérée comme le plus ancien bâtiment de la ville. Son existence est attestée dès le début du XIIIème siècle, probablement construite par les Pisans. Le clocher fut quant à lui érigé au XIVème siècle.
Son entrée possède une loggia couverte par des arcades à colonnes qui formait le coeur de la cité médiévale génoise. C’est ici que se réunissaient les notables pour délibérer, rendre la justice et rédiger des contrats. Un acte notarié passé le 5 septembre 1222 porte d’ailleurs la mention : « sotto la loggia di Santa Maria di Bonifacio ».
Enfouie sous la loggia se trouve une ancienne citerne de plus de
650 000 litres reliée aux maisons avoisinantes par des arcs boutants qui, en plus de leur rôle de soutien, permettent d’y acheminer l’eau de pluie. Ce afin de disposer de réserves en cas de siège.

Da u grecu « ἐκκλησία » (assemblea) è u latinu « religare » (riligà), e chjese è e religione ci adduniscenu da ligacci à Diu. Veru cimentu di e civilizazione. V’invitemu à scopre (o riscopre) unepoche di e più famose chjese di Corsica, distinte da a so storia, u so cuntestu o a so andatura. È cusì sia !

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