20 octobre 2023

Yves Battini ? Eppò !

Yves Battini est de Marignana, village renommé pour ses écrivains et poètes. Cadre de l’Education Nationale à la retraite, il écrit de un à trois textes par semaine, de la poésie ou des articles, des inspirations, notamment dans U Ghjurnalucciu di Marignana, car il en ressent le besoin. C’est aussi pour lui une manière de laisser une trace. Voici quelques courts extraits d’un riche entretien mélangeant littérature, musique et anecdotes personnelles.

Par pudè scriva, ci voli à leghja ?

«Pour pouvoir écrire, faut-il savoir lire ? Roland Barthes disait qu’il n’y a pas de « génération spontanée », tout vient du fait d’avoir lu et relu beaucoup de choses. J’étais à l’école du village et maman était institutrice, c’est elle qui m’a appris. Dans tous les villages, il n’y avait rien à faire. Il y avait les livres de l’école, et en plus de cela maman m’avait abreuvé de livres. Alors je lisais, je lisais toujours. C’est ainsi que toute ma vie s’est passée, même au lycée. En première, j’avais lu tous les auteurs de littérature française, espagnole, italienne, un peu d’allemande et américaine aussi. C’était une passion. Même à la faculté, j’étais en charge de la bibliothèque. Ma femme aimait beaucoup lire aussi, et nous passions la nuit à lire.

Cosa porta a littura ?

La lecture appelle à la réflexion, au développement de l’imagination. Le livre est une compagnie. Il vous apporte tout ce que la télévision et la radio ne vous apportent pas car elles sont trop précipitées, et nous vivons à une époque où tout le monde court. On court après quelque chose qu’on n’attrape jamais. Avec la lecture vient la patience. On y trouve l’expérience de l’autre.

D’induva veni a scrittura ?

On ne peut pas écrire à partir de rien. Il faut une culture. La culture, la lecture, les auteurs vous offrent plusieurs chemins, plusieurs voies, et en écrivant on peut choisir un chemin et le suivre. En ce qui concerne l’inspiration, il m’est arrivé de me lever la nuit et de me mettre tout de suite à écrire, et le lendemain matin je ne m’en souviens plus. Parfois l’inspiration consiste à écrire plusieurs pages en quelques minutes. Et avec une base culturelle solide, il y a une voie qui s’ouvre. De temps en temps, on fait une citation, on s’appuie sur les autres.

N’aveti temi prifiriti ?

L’amour et la passion pour la Corse. Je l’ai toujours eue. Parce que le Corse où qu’il aille est toujours sur une île, la famille est une île dans village, le village est une île en Corse, et le Corse dans sa propre identité, quand il est en France il veut revenir en Corse, et quand il est en Corse il veut partir. Ensuite il y a le thème bien entendu de la nature. Ayant grandi à la campagne, j’étais au milieu de cette nature, les arbres, les animaux. Alors il y a toujours quelque chose à dire. Ensuite, sur le plan de la philosophie, il y a certaines choses qui me font réfléchir plus que d’autres : l’humanité, la façon de vivre, le bonheur. Le bonheur est fait de choses simples. Il faut prendre ce qui vient et se contenter de ce que nous avons et pas de ce que nous voudrions avoir.

A manera di campà oghji, u rapportu trà u soldu è a filicità ?

J’ai connu la vie agropastorale. Il n’y avait pas d’argent, on faisait l’échange. Il y avait des biens en abondance. Mais après la guerre, il y a eu un changement car nous sommes entrés dans le capitalisme. Avec l’argent, les gens sont devenus fous et cupides. Avant, on jouait avec rien. Maintenant, les enfants sont trop gâtés et tout est instantané. Mais ils ne sont pas forcément heureux.»

Y a-t-il des thèmes sur lesquels vous n’aimez pas écrire ?

La politique. Car je ne veux pas me décevoir en regardant ce qui était espéré et voulu et ce qui a été fait. Les promesses qui ont été jetées et oubliées. Je préfère regarder ce qu’il se fait de bien, comme l’artisanat par des jeunes.

Et votre parcours musical ?

J’ai commencé à jouer de la guitare au Colibri, un bar de la place Abbatucci, au milieu des barmaids, et nous on était des puceaux, ça les amusait. J’en ai gardé de bons souvenirs car c’était une époque où l’on sortait de l’adolescence pour devenir des hommes. Dopu aghju scuntratu parechje parsone chì m’anu amparatu parechji stili di musica : François Giordani, Victor Sanna, Jean Bozzi, les Paoli ….

Est-ce qu’il y a un rapport entre la musique et l’écriture ?

Les deux sont des façons de s’exprimer. Chateaubriand a dit « La poésie c’est le chant intérieur. » L’écriture ça vient de la culture. Il y a des similarités. Mais au départ ce n’est pas le même don. Il y a un cerveau particulier chez les musiciens. La musique, il y a une part d’inné. C’est dans les gènes quelque part. Déjà dans le ventre de la mère, l’enfant entend la musique. Le chant corse part de l’intime, c’est presque animal, et il monte jusqu’aux nues. À Stockholm lors d’un concert avec des musiciens russes, tchèques, et autres, la directrice du conservatoire est venue me voir pour m’embaucher car la musique corse pouvait faire évoluer leur musique, car elle apporte quelque chose qui est différent et n’existe pas chez eux.

Y a-t-il un de vos écrits qui vous touche particulièrement ?

Tout simplement un acrostiche que j’ai écrit pour ma femme qui me manque tant.

Traduzzione in francese

Ùn si pò scriva cà una cundizioni ! Quella d’avè lettu assai. A littaratura t’hà una piazza impurtanti in a vita d’Yves Battini. Li parmitti di rifletta, di pinsà, d’apra è d’allargà i so orizonti. Hè un tempu longu è attivu chì dumanda pacenza è chì ci arricchisci da a sperianza di l’altru. Si ritrova stu rapportu trà pacenza, qualità è travagliu in a musica chì li piaci : u jazz. Hà sunatu cù parechji musicanti corsi è stranieri.

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